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LA CRÉATION DES SONS POUR LA MUSIQUE CONCRÈTE, une problématisation, chapitre 1
30 novembre 2025
Sur cette image fixe, prélevée dans une des séquences filmées par Régis Lacaze en vue d'un film que je réalise sur mes musiques concrètes, ma main se prépare à donner une chiquenaude à une assiette plus grande que celles en dessous, ce qui va produire une vibration intéressante, à,la fois par son oscillation, et par la façon subtile dont elle décroît (un itératif complexe ou X'', pour employer le vocabulaire du Traité des Objets Musicaux). Grâce à Aperçu version 11.0, j'ai pu faire disparaître l' « arrière-plan ». Dans ce cas: un évier, des verres à eau lavés et rincés, des produits à vaisselle, rien d'intéressant et surtout rien qui joue un rôle dans le son obtenu, pas d'un coup mais en effectuant plusieurs essais. En somme, de l'image que vous voyez, j'ai effacé tout ce qui ne produit pas le son en question. Dans mon film tel qu'il sera monté, on entendra d'abord celui-ci sur écran noir, tel qu'il pourrait être entendu dans une musique concrète, et ensuite seulement on le réentendra avec la vision des sources. Et si je l'incorporais dans une œuvre, il ne serait pas mentionné : « sons faits avec une pile d'assiettes ».
En effet, l'histoire de la création d'un son, puisque celui-ci est fixé et non éphémère, peut ne pas s'arrêter là : je peux – par ce qu'on appelle « manipulation », et que je préfère appeler « modelage »- effectuer sur l'enregistrement premier différentes actions successives (juste après ou l'année suivante, ou dix ans voire cinquante ans plus tard), en faire autre chose, par montage, actions de filtrage, de transpositions, d'inversions, etc... ...
À la recherche de la lettre, chapitre cinq
22 juin 2025
Ce Grand Canyon, où se déroule la dernière scène de Thelma & Louise (dont je parlais au début de cette mini-série), Anne-Marie et moi l'avons vu de nos yeux, en 1990, lors d'un voyage Eastcoast/Westcoast par voie de terre, de New York à San Francisco. Une traversée des USA effectuée en alternant les trains de nuit Amtrak (remarquables par leur lenteur) et des voitures de location qu'Anne-Marie conduisait, car je n'ai pas mon permis. Entre Denver, Colorado, et Salt Lake City, Utah, nous sommes passés par des sites tels qu'Arch Monument, Monument Valley, Bryce Canyon, etc... et ici le Grand Canyon. En face de cette merveille de la nature où se lit l'ancienneté de la Terre et l'immensité de ses bouleversements géologiques, le sentiment dominant que j'ai éprouvé n'est pas de l'extase, plutôt de la terreur. Pas une terreur sacrée, je précise, rien de transcendant, une terreur pure, un accablement. Comme si j'avais été propulsé dans l'espace vide, privé d'espoir et de foi.
Olivier Messiaen, à la même place (il avait visité ces sites, qui lui ont inspiré sa belle suite Des Canyons aux étoiles) y avait reconnu la présence de son Dieu. Tarkovski, dans son Journal, ne comprend pas pourquoi les Américains y installent des Mac Donalds et des stations d'essence, plutôt que des temples. Moi, je n'éprouvais qu'une envie : fuir cette place pour les villes, sans pour autant refouler les sentiments qu'elle m'avait inspirés ou plutôt confirmés: la plus grande partie de la Terre n'est pas faite pour les hommes, si ceux-ci n'y amènent pas tout ce qui la leur rend habitable. Un poète français avait su l'exprimer, dans des vers que je savais par cœur : « Ne me laisse jamais seul avec la Nature / Car je la connais trop pour n'en pas avoir peur. ». Heureusement, je n'étais pas seul. ...
À la recherche de la lettre, chapitre quatre
15 juin 2025
Dans Superman III, réalisé en 1983 par Richard Lester, le super-héros volant, sous l'effet corrupteur d'une Kryptonite de synthèse qu'on lui a fait absorber et qui le rend méchant, utilise sa force d'extra-terrestre pour effectuer des actions perverses : l'une de celles-ci (c'est d'ailleurs la seule scène que je me rappelle du film, que j'ai envie de revoir car j'aime la série, et notamment l'interprète du rôle Christopher Reeve, unique par son mélange de gigantisme et d'humanité sensible) consiste à redresser par la seule force de ses muscles la Tour de Pise, faisant le désespoir des marchands de souvenirs dont l'un le maudit par le terme de stronzo
(« connard »). Heureusement, vers la fin du film, rendu à sa véritable nature, Superman/Clark Kent lui redonnera l'inclinaison qui l'a rendue mondialement célèbre. ...