News

MESS 1, feuilleton pour prendre de la distance

4 février 2024

Ce plan est emprunté à un film sur lequel j'ai écrit plus d'une fois, notamment dans le mensuel Positif, et que je continue de trouver virtuose et magique, tout en étant profond : c'est le fameux Usual suspects de 1995, écrit magnifiquement par Christopher McQuarrie, magistralement dirigé par le sous-estimé Bryan Singer, monté avec quel talent par John Ottman (qui en a aussi écrit la musique, d'un style romantique inattendu!), et enfin interprété par un impayable bric-à-brac de bons acteurs  (voir Entre deux images n°88) Ici, il s'agit d'un court échange entre Rabin (Dan Hedaya, à gauche), le policier qui a dû prêter son bureau encombré à l'agent Kujan (Chazz Palmintieri, à droite, un acteur que j'apprécie, voyez-le dans Il était une fois le Bronx, 1993, qu'il a écrit et qu'a réalisé Robert de Niro) , pour y interroger longuement le suspect Verbal Kint (Kevin Spacey). Ce court échange, et l'écho qu'il a dans la tête de Kujan, va entraîner le twist final.

En me servant du scénario, accessible sur Internet, je donne le dialogue en anglais avec sa traduction : ...

lire la suite

ANT(hy)POSTASE, une mini-série théorique, chapitre 5

21 janvier 2024

« Passons maintenant à quelque chose de complètement différent. » C'est sous ce titre volontairement parodique que les Monty Python – dont mes lecteurs savent qu'ils sont mes références pour beaucoup de choses (voir notamment les blogs 7, 21, 46 et 71 de la série Entre deux images) - arrivèrent sur les écrans français  en 1974, dans un film à sketches baptisé chez nous Pataquesse, et plus tard pour sa ressortie, La Première folie des Monty Python: il s'agissait d'une sélection pour le grand écran de certains de leurs meilleurs sketches à la BBC. Le mot « différent » y apparaissait pour ce qu'il est : purement contextuel, et inapte à être hypostasié, puisqu'il suppose deux termes et un critère de comparaison, qui peut être insignifiant et n'a aucun sens en dehors d'un certain contexte. De deux frères, l'un est droitier et l'autre gaucher, et hop ! Ça fait une différence. Est-elle décisive, je vous le demande ? Ça dépend de chaque histoire individuelle.

La notion n'en est pas moins capitale : ainsi la linguistique moderne n'a pu naître que lorsqu’a émergé, grâce à Saussure et à d'autres, la notion de « phonème », qu'il faut distinguer du son lui-même (ce qu'ont oublié des compositeurs pourtant avisés qui, comme Berio, ont cru travailler sur des phonèmes de Joyce en manipulant électroniquement un enregistrement de quelques lignes d'Ulysse). Cette notion établit qu'une langue n'est qu'un système de différences, qui se jouent par paire d'oppositions pertinentes à l'intérieur du système phonologique propre à chaque langue, ces différences et oppositions n'ayant aucune importance en dehors de ce système. Ainsi, en français, vous pouvez prononcer le « r » du verbe... "prononcer" de quinze façons différentes, on comprendra "prononcer", tant que cela n'entre pas dans une paire de traits distinctifs pertinents. ...

lire la suite

HOMMAGE À FRANCIS DHOMONT (1926-2023)

14 janvier 2024

C'est en 1988, chez François (auteur de la photo) et Geneviève Bayle (au centre, bien entourée), sur leur merveilleuse terrasse en plein cœur du Quartier Latin, qu'a été prise cette photo sur laquelle Francis Dhomont, souriant comme toujours, et moi-même avons trinqué à... l'amitié, certainement, et à la musique que nous pratiquons en commun, même si certains (dont François, initiateur de cette formulation, et Francis) ont opté pour l'appellation « musique acousmatique », tandis que je préfère depuis 1988 la nommer musique concrète. Dans les deux cas, il s'agit des mêmes musiques faites sur le principe d'une fixation sur un support, quel que soit ce dernier et quelles que soient les techniques, esthétiques et sources mobilisées. Deux appellations différentes, et non deux concepts différents. Là encore : pas d'hypostase !

Francis Dhomont nous a quittés le 28 décembre dernier, en Avignon où, après avoir vécu et enseigné à Montréal, il s'était installé pour sa retraite d'enseignant avec sa femme, l'artiste colombienne Inès Wickmann. Né en 1926, un an donc avant Pierre Henry, il était notre doyen à toutes et tous. Inès et son amie Annette Vande Gorne ont fait circuler la nouvelle, et les hommages de compositeurs·trices internationaux, auxquels je me suis joint, n'ont cessé d'affluer pendant quelques jours sur ma boite mail. L'homme, ouvert, chaleureux et qui a beaucoup fait pour les autres, y était autant loué que l'œuvre. ...

lire la suite